Un visionnaire, un architecte sonore, une ancre qui groove, une colonne vertébrale, The Hype prend forme. McCormick & Martin n'ont pas suivi, mais les deux frères Evans sont à la guitare, Adam et Larry à la rythmique basse & batterie et Bono au chant.
David a 15 ans. Il intimide dès le départ Bono. Même si il est plus jeune que lui. Il a cette tête presqu'autochtone, angulaire, et il est dans la classe d'Alison Stewart, intérêt amoureux de Bono. Si Bono joue (mal) Something à la guitare pour Ali, ce maudit guitariste est capable d'absolument tout jouer. Et la rumeur dit qu'ils prennent des fois des marches ensemble, après les cours.
David Evans et son frère son si obsédé par la guitare qu'ils ont construit les leurs de toutes pièces. David achètera sa première guitare, une Gibson Explorer, en 1977, dans un voyage familial. C'est à peu près là qu'il reçoit le surnom de The Edge, car quand il joue on a l'impression que c'est son cerveau qui prend une forme sonore. Il entre comme en trance. Ne semble pas trop savoir ce qu'il fait et tente de trouver l'espace entre les notes, ces notes que personne n'aurait jamais joué. Tout en jouant sans expression aucune. The Edge est minimaliste de nature. Là où Bono est maximaliste. Ying/yang. Jouer au poker contre The Edge, vous perdez. Il ne réagit aucunement du visage. The Edge est le silence dans tous les bruits. La lumière dans toutes les peintures. Ça intimide. Et ça plait à tous.
Quand Bono s'obstine avec lui, sur la musique progressive dont il n'est pas partisan, on finit par s'entendre (croit Bono), mais ensuite il se comporte avec son instrument comme si ils n'avaient jamais débattu le sujet.
À la basse, le trop cool Adam Clayton, qui pourtant ne sais pas tellement en jouer. Evans reste le plus musical du lot, mais aussi le plus grand partisan de Clayton. Car les Evans et les Clayton étaient voisins et The Edge avait été témoin du rejet familial d'Adam par sa famille qui voulait le meilleur pour ses enfants, Adam a un frère et une soeur aussi. De le voir ne pas s'intéresser à l'école, être entièrement concentré sur le monde musical, admirer Sid Viscious, les épouvante. Si ça épouvante la famille Clayton, ça convainc Larry et David, c'est le plus sérieux pour le band et il se propose même d'en être le gérant. Et ce style ! On doit le présenter sur scène. Larry et David sont tous deux de nature discrète. Larry est prêt à être son coach de rythmique. Pour ajouter au mythe du gars cool, il fait une course tout nu dans les corridors de Mount Temple et cette folie l'en fait expulser. Il a maintenant tout son temps pour s'investir en musique. Entrepreneur naturel, c'est lui qui organise les premiers concerts de Feedback, ils ne sont plus The Hype, ils ont appris ce nouveau mot applicable à des sons de guitares pas mal cool.
Et Bono ne peut pas se plaindre qu'Adam ne sait pas tant jouer, il n'a jamais complètement chanté non plus. Il a de la personnalité et tout les 4 s'entendent merveilleusement bien. La confiance naturelle de Clayton est telle qu'on ne réalise pas tout de suite qu'il ne connait pas les notes. Il bluffe un bout de temps, mais ne choisit pas les bons registre ou joue différemment chaque fois.
On ne sait pas trop quoi faire de Dik Evans, le grand frère de The Edge. Il semble sur une autre fréquence musicale. Là où on est plus punk, il est surtout Rolling Stones. Blues. On hésite à l'écarter du band. Perds-t-on The Edge si Dik n'est pas dans le band ? La question se règle toute seule quand les gars pratiquent tous les samedis dans un local de Mount Temple et que Dik est forcé à l'extérieur, à l'université.
Bono dira que ce ne fût pas long que les chansons qu'il n'arrivait pas à jouer avec son frère Norman, il n'arrive pas "beaucoup mieux" à les jouer avec Larry, The Edge & Adam. Très vite, Bono parle des airs qu'il a dans sa tête. Adam parle aussi du groove qui l'habite. On apprend vite à composer collectivement parce qu'on arrive pas à bien jouer les chansons des Beach Boys ou des Beatles ou de Bob Dylan.
Steve Averill est un voisin de The Edge et Clayton. Il est aussi chanteur du groupe punk irlandais The Radiators. Clayton et The Edge lui demande de trouver un nom plus intéressant que The Hype ou Feedback. Il sera important dans le développement visuel du band dans les décennies à venir. C'est lui qui leur suggère d'être politique et d'utiliser quelque chose de rassembleur comme U2. Jeu de mots sur l'avion espion descendu pendant la Guerre Froide et les invitants mots "You too" (
toi aussi). On passe près de s'appeler The Flying Tigers. C'est Averill qui les met en contact avec un producteur télé d'émission pour enfants. Il serait prêt à les entendre afin d'y être intégré le temps d'une chanson.
Une émission pour enfants ? Pas super punk. Mais la télé, ça rejoint des millions. Ça a lancé Bowie, Elton John et les Sex Pistols. Lors de l'audition, les gars n'ont pas composé de morceaux à eux encore. Le producteur les rencontre en disant: J'entends dire que vous écrivez vos propres morceaux?..." Ce à quoi Bono, toujours trop spontané, ment "oui!". The Edge, Adam et Larry se regardent, avec des faces de poker. Bono lance "Allons y avec
Glad to See You Go"
....des Ramones. Le producteur est épaté, n'y voit que du feu car il ne connait pas Joey Ramone et les engage.
Mais le jour du tournage, les gars de U2 ont composé un morceau depuis. Et le leurre une seconde fois. Ils jouent leur composition Street Mission. Où les 4 brillent déjà à chacun de leur art. Personne ne remarquera vraiment la supercherie. Le premier miracle de Joey Ramone.
Bono a tous ses sens aiguisés quand Alison Stewart, qui refuse qu'on l'appelle Alison, ce sera Ali toute sa vie, est autour. En attendant l'autobus 31A un jeudi dans la même semaine où on devenait U2, Bono embrasse Ali. Il la trouve aussi dérangeante que réconfortante. Il est inspiré autour d'elle. C'est fou ce qu'il la trouve belle. Quand Bono l'invite chez lui, il lui fait visiter la maison vide et sa chambre. Ce n'était nullement calculé mais on fini un peu déshabillé sur le lit de Bono...
...quand son père arrive pour une très rare fois, plus tôt. La panique s'installe. Il ne connait aucunement Ali. Même Bono ne la connait pas entièrement. Il lui dit de se cacher sous le lit, ce qu'elle ne croit pas être en mesure de faire, le lit n'est pas assez haut. Mais elle réussit. Le père de Bono lui demande ce qu'il fait à cette heure du jour, au lit. Bono ment qu'il se sent malade. Mauvais mensonge. Son père choisit de s'asseoir sur le lit et de lui poser toutes sortes de questions.
Seul Bono sait qu'Ali étouffe sous ce lit, sous le poids de 2 Hewsons.
Encore une fois papa Hewson n'y verra que du feu.
On leur fait rencontrer Paul McGuinness qui pourrait croire en eux et devenir leur vrai gérant.
Mais quand Paul n'est pas certain de leur fournir une van, ce qu'ils considèrent indispensables pour se déplacer de ville en ville, à Londres surtout, quand Paul ne peut pas leur dire qu'ils sont prêts pour des auditions à Londres pour les étiquettes de disques, on doute qu'il soit l'homme de la situation.
Mais on est tous adolescents. Pas Paul McGuinness. Qui a 10 ans de plus qu'eux.
Il croit au feu qu'ils s'apprêtent à allumer.
Continuez de pratiquer.
Continuez de sur scène vous donner. Mème si dans la foule trop facilement vous reconnaissez vos amis Dik, Guggi, Gavin et vos blondes Ali, Ann (Acheson, amie d'Ali depuis toujours et blonde de Larry) et Aislan (blonde d'Adam).
Ils suivront la consigne.
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